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Afrodescendants d'Amérique Latine et des Caraibes
6 mars 2015

De la Discrimination raciale et de genre à Cuba

 Écrit par  IVET GONZÁLEZ-IPS/LA HABANA

L'activisme contre le racisme à Cuba se consolide et repense les stratégies de travail face à la floraison des inégalités raciales et de genre après les transformations sociales entrainées par la réforme économique lancée en 2008 par le président Raúl Castro.

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Selon l'universitaire Daysi Rubiera, leader de cette lutte dans ce pays caribéen, durant la Décennnie Internationale des Afrodescendants qui a débuté cette année, la mobilisation communautaire et l'obtention de politiques publiques pour réduire les désavantages des populations noires et métisses devraient être centrales pour les groupes de la société civile qui luttent contre le racisme.

Les discriminations raciales et de genre se manifestent dans tous les espaces de la société cubaines , non seulement dans l'accès à l'emploi et aux ressources ou à l'intérieur du foyer, mais aussi dans le comportement social des hommes et des femmes”, pense l'historienne de 76 ans, fondatrice du groupe fémniste Afrocubanas, dans une interview accordée à IPS.

Il s'agit là de l'une des questions n'ayant pas été solutionnée par la Révolution de 1959 , qui même si elle a décrété constitutionnellement la non-discrimination et l'offre d'opportunités égales de formation éducative et d'emploi aux personnes noires et métisses, n'a pas réussi à freiner le racisme historique d'un pays dans lequel l'esclavage a été aboli en 1886.

Occulté durant des décennies, le problème racial a été traité par le discours d'État au cours des dernièeres années, tandis que les groupes antiracistes non gouvernementaux augmentaient, avec parmi les plus actifs, la Confrérie de la Négritude ( Cofradía de la Negritud), la Commission José Antonio Aponte de l'Union des Écrivains et des Artistes de Cuba, le chapitre cubain de l'articulation Régionale Afrodescendante ( Articulación Regional Afrodescendiente - ARAC) et le Réseau de Proximité Afrodescendant (Red Barrial Afrodescendiente RBA).

Pour  Rubiera, la Décennie promue par l'Organisation des Nations Unies donne de la visibilité à un conflit de plusieurs siècles et renfoce la coopération régionale et internationale pour garantir les droits humains des personnes afrodescendantes.

Elle croit qu'à Cuba, il y a effectivement beaucoup de terrain parcouru en matière de reconnaissance citoyenne et d'accès égalitaire à la santé, l'éducation et l'emploi.

Nous savons quels sont nos problèmes, ce dont nous avons besoin c'est de commencer à les résoudre”, pense-t-elle.

Dans ce pays d'environ 11,2 millions d'habitants, 9,3% de la population est de peau noire et 26,6% sont métisses, et les deux groupes concentrent les précarités dues aux inégalités historiques.

Les recherbes statistiques pour détailler la situation de chaque groupe racial n'abondent pas, mais diverses études sociologiques indiquent que la population afrodescendante reçoit moins de revenus, vit dans les pires logements et a une présence moindre dans l'éducation supérieure, des postes de direction et de secteurs émergents de l'économie, comme le tourisme et les entreprises dispodsnt d'u capital étranger.

Selon Rubiera, l'essor du travail à propre compte (privé) dans ce pays de gouvernement socialiste et d'économie centralisée, du fait de l'extension des activités libres face à l'offre et la demande, dans le cadre de réformes économiques, a permis de rendre visible la ségrégation au travail du fait de la couleur de peau, sans mesures spécifiques pour contôler cette tendance.

Pour faire face à la crise économique prolongée, qui a débuté dans les années 90 et actualiser le modèle économique, depuis 2008 ont été implémentées de mesures qui flexibilisent l'activité indépendante, permettent les investissements étrangers et réduisent les subventions publiques entre autres points.

La réduction des personnel de l'État a amené le secteur autonome à occuper 473.000 personnes dans 188 activités à la fin de 2014.

Du fait qu'il s'agisse d'entreprises privées, elles se reservent le droit d'embaucher, et plus on monte dans la le niveai d'emploi, plus les employés sont blancs. Les personnes de peau sombre restent dans ces espaces qui ne donnent pas des services au public et pour lesquels les salaires sont peu élevés”, décrit la chercheuse.

Des données d'une récente recherche, connue dans les réunions trimestrielles de l'organisation Afrocubanas, révèlent que seulement 9% de la population universitaire à la Havane est noire ou métisse.

La croissance des foyers à la charge des femmes afrodescendantes seules et disposant de moins de ressources pour leur subsistance préoccupe également.

Leurs enfants doivent chercher un travail pour gagner de l'argent rapidement et aider pour les charges familiales, ce qui les met dans une condition désavantageuse pour étudier au niveau supérieur ”, explique Rubiera, l'auteur du témoignage “Reyita, sencillamente” qui raconte l'histoire d'une femme esclave, raconté par sa fille.

Les médias audiovisuels cubains contribuent aux stéréotypes racistes en présenteant les personnes afrodescendantes dans des conditions de subalternes et dans des rôles négatifs, une endance que répètent la musique populaire et l'humour scénique.

Concernant les femmes noires et métisses, elles restent moins présentes dans les médias de communication et sont exposées au modèle dominant de beauté occidentale intronisé par les industries culturelles.

“Les présentatrices noires d'émission de télévision sont rares. Si le modèle noir se transforme en un besoin pour progresser au travail et pour l'ascension sociale, c'est qu'il ya une violence symbolique très forte envers elles ”, expose la leader des droits des personnes afrodescendates.

Des documents programmatiques du gouvernement cubain commencent à placer la thématique raciale comme un conflit social  urgent. C'est le cas du rapport de la Conférence National du Parti Communiste de Cuba qui a en 2012 indiqué que  “d'affronter les préjugés et les conduites discriminatoires pour la couleur de la peau ” puisqu'ils sont contraires à la Constitution et aux lois.

Le président Castro l'a également mentionné dans ses discours et a proposé de promouvoir des personnes afrodescendants à des fonctions politiques, à la suite de quoi, on compte désormais 37% des membres qui ne sont pas blancs dans l'Assemblée Nationale élue  en 2013, proportionnellement aux pourcentages démographiques.

Dans la société civile, on apprécie également les efforts fait pour amener cette thématique dans le discours public, comme la célébration en décembre de la Première Journée contre la Discrimination Raciale, au cours de laquelle l' ARAC a organisé des colloques, des ateliers et des présentations culturelles autour de cette thématique.

Mais, selon Rubiera, une action plus énergique est nécessaire. “Indépendemment des tentatives d'éradiquer le racisme dans la Révolution, la mentalité de la majorité des dirigeants n'a pas changé ”, indique l'activiste et non moins féministe.

 Parler sans hypocrisie sur les inégalités serait, selon elle, le point de départ pour une véritble transformation.

Tant qu'on n'entre pas dans les écoles primaires pour éduquer d'une autre manière, nous n'allons pas résoudre le problème ”, affirme-t-elle.

Comme d'autres activistes,  Rubiera propose la création d'un corps légal spécifiques pour sanctionner les manifestations discriminatoires subies par les personnes non blanches, particulièrement de la part de corps institutionnels comme la police.

Elle réclame de plus une plus grande unité entre ceux qui défendent la cause raciale, compte tenu de la fragmantation et des différences actuelles entre ces groupes.

Si nous ne nous mettons pas d'accord et ne travaillons pas ensemble pour proposer des solutions, sans protagonisme, nous n'aiderons pas non plus ”, estime la promotrice du RBA.

Les aspirations futures de la leader comprennent une association des afrodescendants qui permette de partager les forteresses de leur identité raciale et de concrétiser un programme de demandes communes à divers collectifs. 

  “Le pays doit tracer ses politiques sociales en incluant ces problématiques et socialiser les statistiques par couleur de peau et par genre pour visualiser les progrès et les défis ”, conclue-t-elle.

 

Traduit de l'Espagnol par Guy Everard Mbarga http://guyzoducamer.afrikblog.com/

http://www.elpaisonline.com/index.php/2014-09-15-01-47-19/mujer-activista/item/160729-cuba-y-la-discriminacion-por-genero-y-raza

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