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Afrodescendants d'Amérique Latine et des Caraibes
23 mars 2011

Entrevue découverte de Quitéria Chagas, muse afrobrésilienne du carnaval



PAR ANDRÉ REZENDE | FOTOS YURI GRANEIRO/DIVULGAÇÃO

 

 carnaval1

"Le talent est un don de Dieu, mais la pierre brute a besoin d'être polie par la culture", affirme en insistant Quitéria Chagas. Partant de là, j’ai pu  rendre tout de suite compte que j’étais en face d’une Femme, dans tous les sens du terme. Au carnaval, ses courbes et sa sympathie se mettent en évidence. Et loin du festival, son bagage culturel l'aide à progresser professionnellement dans diverses directions,  en écartant cette vieille pensée selon laquelle une belle et charmante femme une tête vide. Dans une entrevue avec le magazine RAÇA BRASIL, elle démontre que ce n’est pas exact, et que la posture et l’attitude font la différence.

 

En plus d’être actrice, vous avez une formation de danseuse classique. Comment est née votre passion pour la danse?

 

 

J'ai décidé de devenir artiste lorsque j'ai vu pour la première fois le dessin animé  Zé Carioca avec Carmen Miranda. Quand je suis devenue plus grande j'ai lu sa biographie écrite par Ruy Castro. J'ai découvert que ce n'était pas elle dans la bande dessinée, mais plutôt sa sœur, Aurora Miranda. Mais pour moi, c'était Carmen et c'est ce que je voulais faire dans ma vie. En voyant ma fascination pour le monde artistique, mes parents m'ont par la suite inscrite à tous les cours liés à ce domaine. J'ai commencé à faire du ballet à 2 ans. Et j'ai continué jusqu'à mes 10 ans. Le ballet est fondamental, à la base de toutes les danses, mais mon corps voulait s’étendre et le ballet limitait mes mouvements parce ce qu’il(le ballet) est rigide, plein de règles et très élitiste. Je voulais montrer l'art au monde, mais je ne me voyais pas dans un théâtre réservé à un public spécifique. J'ai essayé d'autres cours, d'autres danses: le jazz, les claquettes, la danse afro, du ventre, de salon, la salsa. Et dans cette recherche, je me suis sentie heureuse, car mes mouvements et mon corps étaient libres.

 

Et à quel moment la samba est-elle entrée dans votre vie?

 

À 15 ans, j'ai demandé à mon père de prendre des cours de Samba no pé avec Carlinhos de Jesus. J'ai appris à danser la samba, je me suis réalisée et j'ai découvert que tout ce que j'avais appris, je pouvais le faire dans la Samba, dans l'art le plus populaire au monde, le plus démocratique, dépourvu de préjugés, de règles et sans limitation de mouvements. Dans la samba, on est le chorégraphe. À la faculté de danse, mes connaissances ont augmenté. Documentaires, défilés et anciens danseurs de sambas la vieille garde de mestres- salas... Toute cette recherche me donne envie d’essayer de sauvegarder l'art de la samba no pé  et les mouvements perdus avec le temps. J'aime ce que je fais, danser c'est s'exprimer avec le mouvement, c'est interpréter la musique et toute sa musicalité avec le corps. Tout danseur est un grand acteur, qui s'appuie sur la performance, c'est la connaissance du corps, de l'espace, du temps, de l'observation... On retrouve tout cela dans la danse.

 

 En tant que  l'une des muses et passionnée du carnaval, que pensez-vous du fait que actuellement, le marketing et l'argent ont plus de poids que la passion pour la samba?

 

Le Carnaval a permis à l’art noir et à la samba d’être respectés, qu’ils envahissent et conquièrent les classes supérieures et a fait tomber tous les préjugés. C'est merveilleux que le noir, autrefois discriminé pour son art puisse en vivre maintenant. Cet art se professionnalise, chaque jour qui passe, il devient plus lucratif pour ses professionnels, depuis que les entreprises ont introduit d'importants investissements  dans le Carnaval. La visibilité de l'événement favorise le développement et l’augmentation du nombre d’emplois, développe le pays, le tourisme ... le Carnaval aujourd'hui ce n'est pas que l’art, c'est une profession, une entreprise. Le seul problème c'est de ne pas trouver l'équilibre entre les changements et la tradition de la samba, alors on se retrouve dans le danger que représente l’argent qui a plus de poids  que la passion. Mais  le monde de la samba lui-même s’interroge déjà et tente de trouver les moyens pour que le côté commercial ne dénature pas le carnaval et n’éclipse pas la tradition du carnaval.

 

Percevez-vous un changement dans le profil des personnes qui vont voir les défilés c’est-à-dire une certaine élitisation du public?

 carnaval

Il fut un temps où c’était plus élitiste, mais avec l’enthousiasme, l’évolution des écoles étaient affectée lors des jugements, de nombreuses écoles ont réduit le nombre d’ailes, de déguisements payants et beaucoup exigent que  les participants prennent part aux essais et sachent chanter la samba. Ainsi, de nombreuses écoles qui ont un bon capital  actuellement donnent leurs costumes à leurs communautés. La Ligue des Écoles de  Samba du BRÉSIL a ouvert les portes pour que le public assiste aux essais techniques, le Brésilien vit un peu mieux la population revient assister aux défilés, elle a les moyens de payer, puisque le prix d’entrée a un peu été réduit. L'expansion du Sambodrome de Rio, les changements et les investissements du gouvernement de l'État ont fait que le spectacle devienne non élitiste, mais d'une manière équilibrée, de manière à ce que l'élite participe également, parce que le carnaval a besoin de tous; cette diversité c’est ce qui fait que le spectacle est le plus important de la Terre.

 

De nos jours, que pensez-vous du fait d'être une femme noire au Brésil, en plus d'être belle et de posséder un corps sculptural comme le vôtre ?

 

Être noire, femme, artiste, actrice et travailler à l'école de samba, danser... Ho! C’est comme tuer un lion chaque jour, juste d’en parler me fatigue (rires). Ce n'est pas seulement le fait d'être noire, je porte en moi toutes les étiquettes et les stéréotypes possibles, je les brise tous les jours, c’est une lutte qui me renforce. Chaque fois que je brise une barrière c'est une victoire. Les gens qui ne sont pas du milieu de la samba ou qui ne connaissent pas l'histoire de ma vie, quand ils me voient, la première chose qu'ils disent c'est que je viens d'une communauté, que je danse depuis toute petite sur les terrains de jeu, que je n’ai pas fait l'université, que je suis un corps, que la reine de la samba ne pense pas, ne sait pas écrire, s'exprimer, que j'ai une histoire familiale triste à raconter, que j'ai connu la famine... Ils pensent que tous les noirs ont la même histoire. C'est difficile pour eux de croire aussi que d'autres histoires existent, de même que d'autres vies bien différents du stéréotype.

Les noirs eux-mêmes parfois  sont surpris, doutaient, parce qu'ils ne sont pas habitués à entendre d'autres histoires. Je vis en étant remis en question, je dois m’imposer, prouver. Je n'accuse personne, c'est une question culturelle et de coutume que seul le temps, quand il y aura une plus grande proportion de noirs instruits,  ayant des histoires différentes, rien n’étonnera plus le monde. Quand le différent devient habituel, il n'existe plus aucun préjugé!

 

Le stéréotype de la femme  "belle et charmante ", sans rien dans la tête reste très fort au Brésil. Cela vous dérange-t-il?

 

Cela ne m'incommode pas, parce que les gens perçoivent déjà dans mon attitude, quelque chose de différent et ils sont surpris Cela me fait rire, et me donne envie de dire: "ah, je t’ai eu!" (rires). Ce sont certaines femmes qui avec ce stéréotype ont construit cette image, principalement les brésiliennes de l’étranger. Elles ont fait tant de conneries qui ont sali l’image de la femme brésilienne. Nous avons le devoir de changer l'histoire, de faire la différence et d'encourager les jeunes à faire de même.

 

Comment ça?

 

La femme peut être cultivée et belle,  faire de la musculation, prendre soin de son corps, exposer sa beauté sans vulgarité. Pour être cultivée, elle doit être  débraillée, sans sensualité, devoir être éliminée en tant que femme? La façon de penser les gens est assez fous, ils  étiquètent et créent des préjugés en utilisant des masques sociaux. Beaucoup de femmes belles et cultivées, pour imposer le respect, cachent leur sensualité avec la honte et la crainte des préjugés. Je pense que c’est un manque de culture, il faut agir pour ce qu’on est, avec sa personnalité et non sur la base de ce que les autres pensent. C’est très bien de faire la différence et de choquer les gens dans le bon sens, en prouvant que la beauté physique peut et doit être associé à la culture. L'une l'annule pas l'autre.

 

Quel est le poids de l'éducation et de la culture dans votre vie personnelle et professionnelle? De ce point de vue, qu’en a-t-il été à la base pour vous?

 

Pour moi, l’éducation, les cours et la professionnalisation constituent tout ce qui est nécessaire pour un  professionnel qui veut faire la différence. C’est la base de la vie, quand on recherche la culture, on devient professionnel, cela procure l’assurance et de l’attitude dans son art, et le succès est inévitable. Il faut convaincre le public de son art, pour cela il faut se perfectionner. Le talent est un don de Dieu, mais la pierre brute nécessite d’être polie a par la culture. La fonction de tout artiste est de transmettre cela au public et laisser un bon héritage, pour que les jeunes aient de bonnes références et cherchent le savoir dans tout ce qu’ils se proposent de faire.

 

Que pensez-vous de la situation du noir dans la société moderne?

 

Ils manquent des hommes et des femmes noirs instruits, hautement qualifiés, se battant sur le marché du travail d’égal à égal, sans dépendre des quotas, pour les postes exécutifs des grandes entreprises, de scientifiques, d’éditeurs de journaux et de revues, de directeurs de  TV, enfin, des hommes et des femmes noirs, des personnes d’origine humble qui progressent dans la vie, en conquérant et en atteignant ces postes les plus élevés pour équilibrer le système devenir des références, ouvrir le chemin pour les autres, dire au monde comme Obama: "Oui nous pouvons!"

Traduit du Portugais par Guy Everard Mbarga http://guyzoducamer.afrikblog.com

http://racabrasil.uol.com.br/cultura-gente/152/artigo211111-1.asp

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