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Afrodescendants d'Amérique Latine et des Caraibes
20 juin 2012

Émergence d'un Black Power à Cali (Colombie) comme à Atlanta (Usa) ?

La reconnaissance des Afrocolombiens à Cali est le fruit d'une lutte menée par cette population au cours des dernières décennies. Cependant, les efforts collectifs doivent encore prendre le pas sur ceux individuels.

 

William Murillo est au téléphone dans son bureau. Il est le président de la Société Colombienne des Chirurgiens Plasticiens - Chapitre Ouest (Sociedad Colombiana de Cirujanos Plásticos Capítulo Occidente ) et il a autrefois pensé à se lancer dans la course à la Présidence du pays, mais sa famille lui a demandé de ne pas se lancer dans cette aventure. Il a abandonné.

Né à Buenaventura, il a grandi à El Cerrito, vit à Cali, parle français, italien, portugais, anglais, a étudié la médecine à l'Université de Pernambuco à Recife, au Brésil, fait sa spécialisation à l'Université Fédérale Fluminense à Rio de Janeiro et a étudié et pratiqué la chirurgie plastique.

Justement, selon William, à Cali, le noir est en train de conjurer la discrimination par le biais de l'éducation. C'est l'une des clés permettant de comprendre pourquoi,  dans un environnement raciste, un noir réussit à atteindre des fonctions d'importance, et devient un leader visible.

Il se fait en plus respecter grâce à la formation et atteint un niveau socio-économique plus élevé. Dès lors, ajoute Murillo, le regard porté sur l’afrodescendant est différent, on le considère comme étant égal.

 Cependant, pour qu’un noir fasse des études, il faut un effort personnel et familial insoupçonné : à Cali, la participation de la population afrodescendante à l'enseignement supérieur atteint à peine 6%.

En tout cas, Oscar Gamboa, Conseiller Présidentiel aux Affaires Afrocolombiennes pense comme William Murillo. Dans la population noire,  depuis les décennies passées, dans les années 50, 60, une conscience noire a peu à peu émergé sur l’importance de la formation, ce qui a permis à l'Afrodescendant de se dépasser, de croire en lui-même, d’être fier de qui il est, de se démarquer.

Tel est le cas du  chercheur Raul Cuero parti de Buenaventura pour la NASA, d’Amparo Berón Cardona, devenue la première avocate noire (*et colombienne) admise à exercer la profession en Angleterre ; de  Mabel Lara, aujourd'hui l'une des meilleures présentatrices de nouvelles en Colombie ; de Luis Gilberto Murillo, le gouverneur qui se démarque le plus dans tout le pays selon un sondage réalisé par CM&. Murillo est à la tête du Choco.

  Lennos Ramos, le Défenseur du Peuple de Valle,  explique de plus que la législation en Colombie protège les afrodescendants, elle les encourage, ce qui constitue un autre outil de compréhension de l’émergence de ce qu’on appelle le pouvoir noir à Cali et en Colombie.

 Il rappelle la naissance en 1993 de la Loi 70 qui reconnaît non seulement les terres des communautés noires dans le Pacifique, la propriété collective de ces terres, mais encourage également le respect de sa diversité ethnique et culturelle. Il y a à peine un an, a également surgi la Loi contre la Discrimination qui établit  que toute personne qui viole les droits des afrodescendants, des indigènes, de la communauté LGBTI, se verra condamner à un maximum de trois ans de prison.

Cette législation envoie un message, convainc l’afrodescendant qu’il a les mêmes droits que les Blancs, rappelle à ces derniers que discriminer est un crime, les imaginaires et les réalités changent, et nait une culture du respect de la différence.

 Jésus Agualimpia est rédacteur en chef du journal Pacifico Siglo XXI qui circule à Buenaventura et dans le Choco. Il est également un militant. Agualimpia ajoute pour sa part que la population afrodescendante , à travers l'histoire, a sans cesse insisté dans la défense de ses droits, elle les a exigé continuellement.

Dans les années 70, il y a eu l'exigence que prenne fin l’interdiction d’entrée aux noirs dans certaines boites de nuit de Cali, dans les années 90, il y a eu les protestations contre une chaîne de supermarchés qui n’embauchait pas des afrodescendants à cause de la couleur de leur peau.

 Selon Agualimpia, on récolte actuellement les fruits de toute cette lutte: certaines portes se sont ouvertes, certains murs sont tombés, certains racistes ont transformé leur mode de pensée et cela explique également  pourquoi on trouve des dizaines d’afrodescendants à Cali qui exercent un leadership.

L'arrivée de certains Noirs en politique, des sénateurs, des gouverneurs, des maires, a également charrié  d'autres afrodescendants qui les accompagnent dans leurs administrations, occupent des positions de pouvoir.

 Mais jusqu'à présent, tout se réduit à des efforts individuels. Les études, la formation académique, les luttes, la réclamation des droits.  Le conception du grand pouvoir des afrodescendants s'est faite à travers des croisades personnelles.

 

Le journaliste et politologue Urrutia Esaúd  évoque quelque chose d’autre. Il continue de rappeler ce qui s’est passé à Atlanta, aux États-Unis. À la fin des années 80, début des années 90, il y a eu dans cette ville une sorte de concertation.

À ce moment-là, comme c'est le cas actuellement,  Atlanta comptait un  pourcentage important  de population noire. Cependant, ils n’avaient pas accès à l'enseignement universitaire, aux emplois, ils n'avaient pas de représentants aux conseils d'administration des entreprises, et encore moins dans le gouvernement. Ce déséquilibre engendrait un problème social: la violence, l'insécurité, les affrontements.

Une proposition est donc née : ouvrir la porte aux africains-américains, la population exclue. Des postes vacants dans les entreprises commencèrent alors à être offerts aux noirs, de même dans les universités ;  l’homme d’affaires, l’universitaire, le scientifique, l’ouvrier  africain-américain fut accueilli à  bras ouverts.

Aujourd'hui Atlanta est un modèle de développement aux États-Unis.

Le phénomène, soupçonne Urrutia, commence à se reproduire en quelque sorte à  Cali : le fait que l’on retrouve des leaders afrodescendants par dizaines le prouve. De même que le fait que la Mairie ait élaboré un «Plan d'action pour l'amélioration des conditions de vie des Afrocolombiens»(‘Plan de acción para el Mejoramiento de las condiciones de vida de la población afrocolombiana').

 

Ce plan, entre autres choses, offre des incitatifs aux entreprises qui embauchent du personnel afrodescendant très ayant un niveau d'éducation supérieure et s'efforce de financer des projets académiques ayant une majorité d'étudiants noirs, de combler un vide. Pour les Noirs de Cali, le taux de pauvreté est 71,6% plus élevé que pour le reste de la population. Ces chiffres se trouvent dans le document intitulé Desigualdades Étnicos Raciales en Cali’, (Inégalités Ethniques et Raciales à Cali", un par le diagnostic Carlos Viáfara, un conseiller à l'Inclusion du maire.

Esaúd Urrutia évoque alors une sorte d'équation: en améliorant les conditions de vie des Noirs à Cali, on améliore les conditions de vie de l'ensemble de la ville. Cali, insiste-t-il, peut répéter le phénomène d'Atlanta, pour devenir un modèle de développement pour la Colombie, un exemple d'inclusion. Le phénomène, sans doute déjà entamé, représente une autre clé pour comprendre l'émergence de ce qu'on appelle le pouvoir afro.

 Traduit de l'Espagnol par Guy Everard Mbarga http://guyzoducamer.afrikblog.com

http://www.elpais.com.co/elpais/cali/noticias/defensa-derechos-poblacion-afrocolombiana-en-cali

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