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Afrodescendants d'Amérique Latine et des Caraibes
9 septembre 2010

Les Afroargentins, disparus "comme la cannelle dans le riz au lait "

Une habitante de Santa Fe a fait des recherches sur l'histoire et la supposée disparition des Noirs dans notre pays, mais aussi sur les Afroargentins qui ont joué un rôle important dans la littérature de la négritude.

Textes. Mariano Rivera.

Traduit de l’Espagnol par Guy Everard Mbarga http://guyzoducamer.afrikblog.com

PHOTOS.  MAURICIO GARÍN et EL LITORAL.

afroargentinsBeaucoup de mots d'origine africaine restent dans notre lexique, comme chinchulín ou mina.

Dans quel ciel de tambours et dans quelles longues siestes sont-ils partis? Le temps qui représente l’oubli", prévenait l'écrivain Jorge Luis Borges en parlant des Noirs qui vivaient dans notre pays, tandis que Joseph L. Lanuza a écrivait: "Ils s’y sont finalement dissous  comme un soupçon de cannelle dans le bol de riz au lait."

C’est par ces citations que Elena Gandolla - professeure d'anglais et d'espagnol Langues Étrangères, qui a récemment terminé une maîtrise dans ces matières à l'Université de West Virginia, États-Unis – a synthétisé ses recherches sur l'histoire et l'héritage "des oubliés afroargentins", comme elle appelle les familles africaines qui vivent dans notre pays et même à Santa Rosa de Lima, un quartier de notre ville.

De passage dans sa ville natale et avant d’aller s'installer au Pays de Galles, l'enseignante de 33 ans a voulu faire connaître ce travail car "il y a de nombreux mythes, comme celui selon lequel les noirs ont disparu à cause de la fièvre jaune de 1871 ou lors de la guerre contre le Paraguay ", mais aussi parce que "beaucoup disent avec fierté qu'il n'ya pas de Noirs en Argentine et tout cela me désespère."

Elle explique que  "les Afroargentins sont peu nombreux par rapport aux autres pays d'Amérique latine, mais ils existent et occupent une place remarquable dans la culture nationale. Ils ont été une partie très importante de notre histoire, ils ont fait beaucoup pour le pays. Je suis surprise qu’il y ait si peu d'intérêt à savoir ce qui s'est passé. Ce n'est pas enseigné à l'école et on dit seulement «il y avait». La négation de l'africanité en Argentine nait au XIXème  siècle du désir de transformer l'Argentine en un pays essentiellement blanc et européen. "

"C’est pourquoi – admet-elle- les Afroargentins faisaient partie de mes projets, un sujet qui planait dans ma tête parce que j'étais curieuse, et ma mission était aussi de le faire savoir pour apporter mon grain de sel et briser un certain nombre de mythes autour d’eux. "

BRISER DES MYTHES

afroargentinoLorsque Elena a proposé ce thème de recherche à son professeur, il lui a dit qu'il y avait des noirs en Argentine. Elle a cependant commencé à explorer Internet et la bibliothèque de son université "avec un désespoir terrible, pensant qu’il n'y aurait rien et j’ai tout trouvé. J’ai trouvé en Virginie-Occidentale un livre écrit par un Américain (George Reid Andrews) qui est venu en Argentine et a fait l’enquête la plus complète sur ce sujet dans le pays. " 

Avec toutes les informations recueillies, Elena décide de réaliser son premier  travail sur l'histoire de ces noirs en Argentine et un autre sur la littérature afrohispanique, écrite par eux ou qui parle d’eux, y compris d’auteurs de Santa Fe.

"Quand je suis arrivée en Argentine, je me suis dit qu’il serait intéressant de faire connaitre ces travaux car il y beaucoup de mythes" à défaire, affirme-t-elle. L'un d'eux disait que les Noirs avaient disparu du pays à cause de la fièvre jaune de 1871 ou durant la guerre contre le Paraguay.

afroargentina1Toutefois, Gandolla les a brisés : "
Le livre dit que durant la guerre contre le Paraguay, il n’y avait qu'un seul bataillon de Noirs, donc elle ne peut pas avoir causé leur disparition. En ce qui concerne la fièvre jaune, il faut que l’on dise le nombre de morts de race noire qu’il y a eu, puisqu’on les comptabilisait déjà, ou alors peut-être que ce n’était pas non plus cela la cause. "

Et elle soutient que "Ce qui s'est passé c’est le blanchissement  préparé par les gouvernements et la discrimination qui a suivi la libération des Noirs. C’était si terrible que les Noirs eux-mêmes essayèrent de se mélanger afin de ne pas subir de discrimination. Certains sont allés en Uruguay (non pas au Brésil comme le disait un autre mythe, parce que le temps y était meilleur), car là-bas, l’environnement était moins discriminatoire et il y avait plus de tolérance, et aussi pour une question de langue. En fait, la discrimination était présente, mais pas aussi terrible qu’ici. "

afroargentinaElle ajoute que "un autre mythe était que les Noirs ne se trouvaient qu’à Buenos Aires, ville portuaire qui les recevait, mais on sait qu’il y en avait également à Cordoba, Salta ou encore à Santiago del Estero, entre autres. On disait même que, dans le nord-ouest Argentin, il y avait des noirs qui parlaient le quechua, selon certains historiens. Cette présence africaine dans l'intérieur a provoqué un important processus de syncrétisme avec les Indiens et de nouvelles catégories raciales se sont ainsi formées. "

Blanchiment

Selon la chercheuse, "En Argentine, on voyait beaucoup de Noirs dans les corsos (défilés), les carnavals, jusqu'au jour où les Blancs ont décidé de faire la comparse des blanc-noir, soit des blancs déguisés en noirs, mais dans un esprit moqueur. Ce qui déplut à la communauté afroargentine et qui la poussa à se mélanger ; à cela s'ajouta la décision du gouvernement de l’époque de ressembler le plus possible à l'Europe, où il n y avait pas de noirs. "

Dans ce sens, elle indique que "la question de la race noire constituait un problème. Lorsqu’on effectuait le recensement, la race noire ne faisait pas partie des choix - dans le cadre d'un processus de blanchiment - mais il y avait différentes catégories comme les trigueños et les pardos entre autres. “saltopatrás’ était une autre des catégories. C’était un enfant né plus noir que ses parents. Imaginez ce que pouvait être la discrimination à cette époque. "

Elle ajoute qu’il " y avait un besoin de blanchir, mais il y avait aussi une question scientifique qui faisait penser ainsi. Ils ne voulaient ni les Indiens ni les Noirs: les premiers étaient plus mis de côté et mélangés, mais les Noirs étaient plus visibles. C'est ainsi que de nombreux présidents se consacrèrent peu à peu, à blanchir la population. Il n'y eut pas d’assassinat, mais une discrimination très subtile. "


Il en reste très peu

Cependant, Gandolla indique que " depuis 2000, a débuté un renouveau sur cette question et le Conicet a réalisé un recensement génétique sans deux districts: San Telmo - Buenos Aires - et Santa Rosa de Lima - à Santa Fe -, où l’on savait qu’il y avait des communautés afrohispaniques. On a découvert que 2% de la population de ces quartiers ont des gènes aborigènes, mais les gens ne le savent pas. Lorsqu’ on demande à quelqu’un un de ses grands-parents était de cette race, très peu l’admettent, car c’est ce qu’on leur a dit. De plus, il ya beaucoup d'ignorance chez les gens car nous sommes convaincus du blanchiment produit par certains présidents. Ça a réellement fonctionné, car dans l'inconscient collectif l'idée qu’il n y a pas de noirs en Argentine est restée. "

Enfin, elle affirme que  " en 1930, la population avait diminué de manière drastique. Il ya peu de descendants purs en Argentine et ils apparaissent au moment du carnaval,  chantant la candombes  que leurs avaient enseigné leurs grands-parents par  transmission orale. À Santa Fe, il n’en reste que très peu et ils sont à Santa Rosa de Lima, un quartier qui a beaucoup de problèmes et ils ne sont pas non plus visibles. Ils ont longtemps été relégués à la pauvreté et à l'invisibilité. Toutefois, en Uruguay la communauté afrodescendante est très active et visible. "

LITTÉRATURE LA NÉGRITUDE

En ce qui concerne l'activité littéraire, elle mentionne que " il y en avait beaucoup en Argentine, et les afrouruguayens se rendaient même à Buenos Aires pour s’y faire publier. En général, les écrivains étaient des enfants de blanc avec une femme noire, qui avaient accès à l'éducation et c’est pour cela qu’il y avait très peu de noirs. Ils aimaient beaucoup la payada et en étaient des spécialistes. Gabino Ezeiza qui était l’un des payadores les plus importants d'Argentine était noir ou mulâtre. "

Elle ajoute que  " en Argentine, il y a davantage de matériel de Blancs qui parlent des Noirs que provenant des Noirs eux-mêmes. C'est ce qu'on appelle la littérature de la Négritude et elle traite des sujets de l'esclavage et de ce que signifie être Noir en Amérique latine. En Argentine, il y a de nombreux auteurs blancs qui écrivaient sur les coutumes des noirs et de la façon dont ils parlaient, de leurs tristesses. J'ai trouvé des contes et des poèmes courts, mais il n y a pas de romans. "

CONTRIBUTIONS À LA LANGUE

Gandolla Elena se montre également admirative de la contribution apportée par cette population africaine à la langue. "J'ai été très intéressé par les mots que nous utilisons et qui ont une origine africaine, comme le chinchulín. Les noires étaient les achuradoras elles ouvraient les vaches et en sortaient les entrailles. Elles étaient chargées d’en faire des plats différents comme le chinchulín ou la tripe Gorda. C'est un met afroargentin  par mi d’autres. De plus, dans la cuisine typique de l’Argentine, on trouve d’autres nourritures qui ont pour origine les habitudes culinaires afro, comme le mondongo (tripes), la mazamorra (bouillie), le locro (sorte de ragoût), et le dulce de leche (crème èa base de lait) ", explique-t-elle.

Elle mentionne également le fait que "dans la langue espagnole du Rio de la Plata, on observe un grand nombre de mots d'origine africaine, tels que arrorró, batuque, bombo, bujía, cafúa, candombe, conga, dengue, malambo, mandinga, marimba, marote, matungo, mina, milonga, mondongo, mucama, quilombo, tango et tarima”.

VENDEURS ET DOMESTIQUES

Les immigrants noirs de l'Argentine se consacraient à différentes tâches pour subsister telles que l'agriculture, ils étaient domestiques dans les foyers de familles aisées (cuisine, ménage et lessive), ou étaient artisans, cordonniers, tailleurs ou coiffeurs.

À Buenos Aires, les esclaves étaient vendeurs ambulants d’empanadas (sorte de tarte), des balais et de plumeaux, de bougies, etc. Ils étaient également responsables de l’élimination des infections, du chargement et du déchargement des marchandises au port.

Les femmes réussissaient à amasser de l’argent comme blanchisseuses ou comme «achuradoras», en enlevant les viscères des animaux qu’elles partageaient par avec les familles sans ressources. Le Chinchulin si connu Argentine en grillade est un héritage direct des afroargentins.

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