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Afrodescendants d'Amérique Latine et des Caraibes
1 mai 2010

Un africain américain à la découverte des afropéruviens et des afroéquatoriens

Écrit par Bill Smith

Traduit de l’Anglais par Guy Everard Mbarga http://guyzoducamer.afrikblog.com/

eq1

En Octobre 2005, j'ai visité Lima, au Pérou pour la première fois, mon but étant de me plonger dans la langue espagnole comme je l'avais fait à Cuba et au Mexique plusieurs années auparavant. À Lima, je n'ai rencontré qu’une poignée de noirs, mais lors de mon week-end dans le district d’El Carmen dans le sud du pays,  j'ai découvert la vie des noirs au Pérou, ainsi que celle des descendants autochtones, comme les peuples Incas et les Amayra.

J’habitais dans une grande famille musicale connue sous le nom de la famille Ballumbrosio dans laquelle le père, le grand Amador Ballumbrosio, aujourd’hui décédé,  a joué un rôle majeur dans la relance et la promotion de la musique et de la danse Afropéruvienne qui aujourd'hui, sont des trésors nationaux. Je m'attendais à dépenser de l'argent pour me divertir, mais comme j’ai pu le constater, la musique afro-péruvienne et afro-cubaine, ainsi que la salsa et le hip-hop américain sont présents directement dans la communauté et gratuitement.

Et contrairement à Lima, la capitale afro-péruvienne d’El Carmen est une ville paisible où les crimes sont à peine présents. S'il ya un quelconque usage de drogues, il reste très discret. Les enfants jouent librement sur  la place la nuit sans que les parents aient toutes les inquiétudes face au danger qui tourmentent la société américaine.


Et ce fut pareil lors de mon second voyage au Pérou en Novembre et Décembre dernier que j'ai passé la plupart de mon temps à El Carmen, plutôt qu’à Lima. J’étais arrivé à temps pour la procession commémorant St. Martin de Porres, un prêtre afropéruvien qui s’est fait remarquer pour son travail inlassable en faveur des pauvres qui fut plus tard canonisé par l'Église Catholique et est devenu un saint. À son honneur, un quartier à Lima porte son nom.

eqAu Pérou, le clivage racial semble beaucoup plus criant qu’aux États-Unis, avec seulement quelques Péruviens qui en parlent ouvertement ou qui semblent le remarquer. Avec des annonces d’emploi qui demandent des personnes «de bonne apparence», un mot codé pour blanc, les Péruviens noirs sont restreints à certains types d'emplois comme agents de sécurité, bonnes d’enfants, artistes ou de sportifs professionnels.

À l'aéroport Jorge Chavez de Lima, je n'ai vu que quatre employés noirs et aucun Asiatique ou des descendants des indigènes. Il n'y avait aucune diversité raciale ou culturelle reflétant la diversité présente au Pérou. Pourtant, de nombreux immigrants péruviens aux États-Unis insistent pour dire que le racisme n’existe pas dans leur pays d'origine.

Après le Pérou, j'ai passé une semaine à Quito, en Équateur connu sous le nom du Milieu du Monde pour sa position juste au niveau de la ligne de l’équateur.

Mais plus important que la visite de l'équateur, je voulais explorer l'expérience des noirs de l'Équateur. Là, j'ai passé du temps avec Gloria, une noire équatorienne qui j'ai rencontré grâce à un ami Facebook. Gloria était l’exemple parfait de ce que j’avais lu et entendu: les AfroLatino qui cherchent à s’assimiler et à "améliorer la race" en évitant des partenaires noirs et en diluant leur héritage noir par le biais du mariage interracial. De nombreux AfroLatinoAméricains pensent que c'est le meilleur moyen de lutter contre le racisme. Gloria, qui elle-même, était mariée à un homme blanc, a un fils et sa fille qui sont tous deux mariés à des Européens. En regardant leurs enfants, on ne saurait pas qu’ils ont des parents ou des grands-parents noirs.

De Quito, je devais choisir entre deux communautés noires; j'aurais pu visiter Esmeraldas en Équateur sur la côte ouest, à 70% noir et qui se compose essentiellement de descendants d'esclaves échappés qui ont construit des forteresses pour se protéger. J'ai choisi de ne pas y aller parce que je ne voulais pas faire face à la chaleur, aux moustiques, ou au crime dont parle la rumeur. J’ai plutôt choisi de visiter une communauté de noirs tranquille dans les Andes, appelée Valle del Chota (Vallée du Chota, où les descendants des esclaves affranchis vivent. J'ai également été attiré par la vallée de Chota, car elle est la région d’origine d’un grand nombre de vedettes du football Équatoriens qui ont brillé lors de la Coupe d Monde 2006.

Une drôle de chose s'est produite alors qu’on roulait en autobus vers Chota; en allant en arrière pour utiliser les toilettes, j'ai engagé la conversation avec l'un des nombreux passagers noirs. Ils ont tous remarqué mon accent non-équatorien et ont commencé à faire plus attention à moi. Quand j'ai lâché quelques mots d’anglais pour les divertir, ils ont tous ri d’étonnement comme s'ils n'avaient jamais entendu un noir parler anglais.

Ma réception par les gens de Chota a été mitigée. Le fait que j'étais totalement étranger et que j’entrai dans cette région froide et que je parlais avec un drôle d'accent ont rendu certains très méfiants. Une dame est allée chercher la police dont la station se trouvait à côté de sa boutique.

J'aurais voulu prendre une photo de la manière dont elle frétillait son doigt et secouait la tête comme pour dire: Ne venez pas ici !" Au lieu de cela, j'ai fini par prendre des photos des policiers au poste tout en leur expliquant pourquoi je me trouvais dans leur ville. Les officiers ont parfaitement compris. Je leur ai donné à chacun une photo de Barack Obama et une carte postale d’Oakland en Californie (ma ville natale), des petits souvenirs très appréciés que je donne à tous ceux avec qui j’établis une relation lors de mes voyages.

D'autres personnes dans la ville ont eu un meilleur sentiment par rapport à ma présence une fois que nous avons commencé à discuter. Quand j'ai quitté Chota plus tard dans l'après-midi, je me sentais tellement exalté d'avoir rencontré et bavardé amicalement avec des hommes, des femmes et des enfants qui m’informaient sur leur communauté. J'avais l'impression que les Noirs du Chota étaient plus en contact avec leur héritage que ceux de Quito. Je me rappelle avoir demandé à des noirs de Quito où se situait le Musée Afro-Équatorien, et ils se tournaient  immédiatement vers une personne qui n’était pas noire pour poser la question comme s’ils étaient eux-mêmes inconscients de leur propre patrimoine.

Bien que l'Équateur comme une population noire beaucoup plus importante que le Pérou, le racisme y est bien présent. Vous ne trouverez pas de Noirs, des autochtones, ou des Asiatiques travaillant dans les banques ou les grands immeubles à bureaux. Il est difficile pour un noir d’emprunter un taxi à certaines heures. Les vendredi soir quand c’est très occupé, c’est presque impossible. En fait, un jour j’ai dû montrer des billets de cinq dollars dans les airs pour avoir un taxi. J'ai trouvé tellement intéressant de voir comment le pilote est devenu détendu lorsqu’il a appris que j'étais un touriste Africain Américain inoffensif et non un afroéquatorien que l’on craint.

J'ai eu un incident semblable au Pérou, lorsque je me suis approché d’une voiture de police garée dans laquelle se trouvaient deux officiers. Il était évident pour eux que j'avais une question, mais ils ont laissé leur vitre de voiture fermée. Lorsque je leur fait un signe pour qu’ils baissent leur vitre, un d’eux l’a ouvert d’à peine

3 cm

. Lorsqu’il a entendu mon accent espagnol non péruvien, la fenêtre s’est totalement rabaissée, et les deux policiers m’ont indiqué la direction dont j’avais besoin de manière joviale.

Sur mon chemin de retour de l’
'Equateur au Pérou, j'ai décidé d’économiser un peu d’argent en prenant un bus pour la ville frontalière de Huayquillas en Équateur, puis de traverser la frontière en taxi vers Tumbes au Pérou, après quoi, j’allais prendre un vol à destination de Lima . Une fois la frontière franchie, mon taxi a été arrêté à trois* reprises par la police nationale péruvienne.

Il devait s’agir d’arrêts de police du genre CEN ou «conduite en étant noir»; sauf que dans ce cas, j’étais le passager. Mon chauffeur de taxi m'a expliqué que le Pérou avait des problèmes avec les trafiquants de drogue en provenance du Ghana, de la Guinée, et d'autres pays d'Afrique de l’Ouest, et qu’ils soupçonnaient que j’en étais peut-être un. Le premier flic était cool. Il a même ri à une de mes blagues. Il lui a fallu une minute pour se rendre compte que mon passeport et ma carte de touriste étaient en ordre. Puis, J’ai repris ma route.
Le second policier qui m’a arrêté vingt minutes plus tard, était plus déterminé à trouver quelque chose de mal. Il a appelé des renforts pour contrôler mes papiers. Ils sont devenus un peu inquiet lorsque je leur ai dit que je travaille pour Barack Obama (rire - je portais un t-shirt d’Obama). Ils m'ont laissé partir.

Le troisième policier, à peine dix minutes plus tard, était plus déterminé que les deux autres. C'est là que je suis devenu très irrité, mais pas assez pour aller en prison. J’ai fait glissé mes lunette à moitié sur mon nez, je l’ai zieuté et je lui donné toutes mes raisons afrocentriques de me trouver au Pérou. Je lui ai dit que je voulais savoir pourquoi il ya tant de discrimination raciale dans son pays et je lui ai demandé combien de policiers noirs il connaissait. Quand l'officier a commencé à s’en aller de l’auto, je l'ai remercié de m'avoir aidé à pratiquer mon espagnol. Mon chauffeur de taxi n’a pas pu s’empêcher de rire et moi non plus.

Un touriste noir de la classe moyenne noire voyageant en l'Amérique Latine sera probablement traité comme tout le monde, si, contrairement à moi, il choisit la route des grands hôtes, des grandes compagnies aériennes, et des attractions touristiques. Une fois, j'ai fait un tour dans le Hilton Hôtel de Lima pour prendre un petit déjeuner car je n'arrivais pas à trouver un restaurant ouvert à 7:00 du matin. Avec ma MasterCard en main, je n’ai pas pu m’empêcher de remarquer tout le respect qui m’était accordé.

Mais en général, je choisis de vivre comme un habitant du coin, en restant dans des familles autant que possible, prenant l’autobus, ou en louant une chambre d’un hôtel dans le quartier. J’ai passé la plupart de mon temps dans les bottes d’une personne de la classe dite inférieure. En tant que voyageur, j'ai supporté un niveau de vie qui gênerait le touriste moyen. Par conséquent, j'avais plus d'argent dà dépenser pour me faire plaisir et en même temps, pour aider ceux qui étaient moins fortunés que la famille américaine moyenne vivant en dessous du seuil de pauvreté.

J'ai dépensé de l'argent pour inviter les familles à dîner à l’extérieur avec moi. Ce fut une joie totale, un plaisir du cœur, et qui valait chaque centime pour voir comment ils aimaient vivre cette expérience inhabituelle. J'ai atteint mon objectif de me faire des amis à vie, en apprenant leur culture, mais aussi et surtout, en améliorant mon espagnol.

Source : adt

* En fait l’auteur a été contrôlé deux fois, puisque à une occasion, c’est lui qui est allé vers les policiers.

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Commentaires
P
j'adore magnifique article!!
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G
De rien Ralph,<br /> Je suis bien heureux de faire partager cette passion en la rendant accessible à d'autres.J'espère en faire davantage dans l'avenir...<br /> <br /> Guy Mbarga
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S
Merci de tout coeur pour ce témoignage très enrichissant. Un récit qui fait un peu froid dans le dos quand on rêve,comme moi, de découvrir l'Amérique latine. Il est certain que le jour où ce rêve se réalisera, j'emprunterai les mêmes voies que l'auteur de ce récit.<br /> <br /> Encore merci, Guy, d'avoir eu cette merveilleuse idée de nous permettre de suivre les actualités des noirs d'Amérique latine.
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