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Afrodescendants d'Amérique Latine et des Caraibes
6 février 2010

“ Il faut décoloniser la mondialisation ”

Bia Barbosa

Traduit du Portugais par Guy Everard Mbarga http://guyzoducamer.afrikblog.com/

fsm1

Au cours du débat ce samedi (30) à Salvador, dans le cadre du Forum Social Mondial thématique de Bahia, les chercheurs et les militants du mouvement social, ont souligné l'urgence de décoloniser la pensée et le savoir en Afrique et en Amérique Latine. Pour l’africain Samba Buri Mboup, il faut décoloniser la mondialisation, en se réappropriant le patrimoine intellectuel laissé par les africains et la contribution du continent faite au monde des points de vue du développement de l’histoire et de l’économie.



Un des principaux défis pour la construction d'un autre monde possible, dans la recherche de l'égalité entre les êtres humains, c’est de réalise ce qui symbolise le logo même du Forum Social Mondial: traiter les continents de manière égalitaire. Et une des premières mesures et des plus stratégiques dans ce sens est le défi de la décolonisation de la pensée et du savoir produit et diffusé dans les deux régions les plus pauvres du monde: l'Afrique et l'Amérique latine. Ce fut l'un des thèmes débattus le 30 janvier dernier à Salvador, au cours du Forum Social Mondial thématique à Bahia, où des professeurs, des chercheurs et des militants du mouvement social en sont arrivés à la conclusion que la mondialisation elle-même doit également être décolonisée.

"Décoloniser la pensée c’est faire face aux défis posés par l’Eurocentrisme et par l'ethnocentrisme comme modes de pensée dominants. Dans le cadre historique marqué par le colonialisme européen, lorsque cette vision centrée sur l’Europe, est utilisée comme cadre de lecture et d'interprétation de la réalité de l’ensemble du monde, il se construit une vision déformée  des patrons et de la nature des peuples ", explique le Sénégalais Sampa Buri Mboup, professeur à l'Université d'Afrique du Sud.

L’essence de la pensée coloniale, l'eurocentrisme a été pendant des siècles la base du projet prédateur et oppressif appliqué par les élites et les peuples du continent européen, en garantissant le maintien de leurs intérêts. Au Brésil, le colonialisme et la pensée produits à cette époque sont directement liés à la construction de la société brésilienne. Il était nécessaire de construire un discours justifiant l'esclavage et l'oppression des peuples autochtones et les Noirs.

                                                                                          

"Les dominateurs se servirent d’un discours religieux, qui disait que les Noirs devaient être  purifiés par le baptême. Tous ceux qui arrivaient ici étaient baptisés et convertis. Le discours idéologique, allié  à la force, fut un instrument utilisé pour conserver  le pouvoir et construire la stabilité pour la classe dominante ", raconte Edson França, coordinateur d’UNEGRO.

Avec la crise causée par la Réforme et la montée de l’Illuminisme, il fallut trouver une justification rationnelle à la suprématie de l'eurocentrisme et le maintien en conséquence de l'esclavage au Brésil. Arriva alors au pays le discours portant le nom de racisme scientifique, qui est fondé sur la classification raciale, où le blanc se trouve au sommet de la pyramide, du point de vue de sa supériorité biologique et le noir en dessous de toute autre ethnie.

"Ce discours permit d’animaliser et de rendre son usage nécessaire. Tout au long du processus de domination, il ne fut pas contesté du point de vue académique et finit par être assimilé par le sens commun. Lorsque le Pape affirma que les Noirs n'avaient pas d'âme, personne ne s'y opposa. Il fallait non seulement justifier l'esclavage pour les classes dominantes, mais aussi que le dominé adhère à ce discours. La faible estime de soi de la population noire permit alors l’intensification de la fragmentation, plutôt que le combat de la pensée et de la structure sociale en vigueur ", affirme Edson França.

Lorsque le racisme cessa de servir les intérêts du capitalisme moderne – et que naquit l’idée selon laquelle il fallait libérer les esclaves pour augmenter la masse des consommateurs - le discours colonisé encouragea le métissage pour "blanchir le Brésil." Et jusqu’à présent, les effets causés par la pensée coloniale sont structurants des inégalités entre blancs et non blancs dans notre pays.

Pour les mouvements qui s’organisent autour du Forum Social Mondial, un certain nombre de défis et d'enjeux stratégiques se posent face à la construction d'un autre monde possible et relativement à la décolonisation de la pensée. Pour le professeur Samba Buri Mboup, il faut commencer par décoloniser la compréhension du concept même de la mondialisation, puisque le monde global a également soutenu cette inégalité. Ce sont des objectifs qui vont de la déconstruction du mythe de l'Afrique comme un continent sans Histoire à la lutte contre l'idée de la marginalisation du continent dans le commerce et dans l'économie.

"Malgré le discours dominant, il existe de nombreuses preuves que l'Afrique fut le théâtre d'une histoire et d’une science aussi ancienne que les débuts du monde, et central à tous les moments de l'économie mondiale : dans la phase d’accumulation primitive, de la colonisation, lors de la révolution industrielle, durant l'ère postcoloniale et jusqu’à aujourd'hui. La réalité est présentée à l'envers, pour que nous nous considérions nous-mêmes comme des enfants, alors que notre continent est le berceau de la civilisation humaine. Il est nécessaire de réévaluer le potentiel de l’héritage africain", estime Mboup.


Dans le continent oublié de la planète, l'alternative au discours colonial en Afrique est appelée la Renaissance Africaine, un projet global de société et de civilisation construit dans une réponse collective et organisée de l'Afrique aux défis de la mondialisation. Le projet, dont se sont déjà appropriés 20 pays, propose la prépondérance de la connaissance scientifique et de la technologie, l'autonomie et le rajeunissement de la conscience politique africaine - comme réponse à la crise de leadership sur le continent -, et la sensibilisation fondée sur l'unité des peuples africains.


"Il ya des études qui démontrent clairement et irréfutablement la profonde unité culturelle des peuples africains. Aujourd’hui, on saisit le potentiel de développement africain au service d'une cause qui n’est pas nôtre, en nous imposant une situation de monolithisme et d'intolérance religieuse, alors que l'histoire africaine est faite de pluralisme. C'est un proojet que l’on doit également enseigner dans les écoles ", conclut Samba Buri Mboup.

Source: Carta Maior    

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